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Resumen de La fraternité et le droit

Michèle Bonnechère

  • « Nos frères » : ainsi Louis Aragon évoqua-t-il le souvenir de ces 23 étrangers résistants, fusillés par les nazis le 21 février 1944, dans son poème en mémoire du groupe Manouchian, « Strophes pour se souvenir ». « Pourtant », ajouta-t-il : image très forte de l’échec de l’ « affiche rouge » avec ses photos d’hommes « hirsutes et menaçants », qui ne suscita pas la peur chez les passants, mais pour beaucoup un sentiment fraternel (1). La fraternité, ressentie et vécue comme lien d’humanité commune, qui rapproche et interpelle.

    Inscrite dans la devise républicaine, elle serait difficile à mettre en œuvre pour certains juristes, qui préfèrent parler de solidarité. Ce qu’a contredit le Conseil constitutionnel le 6 juillet 2018 : « La fraternité est un principe à valeur constitutionnelle. Il découle du principe de fraternité la liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national » (2). Ainsi est proclamée la valeur de principe juridique de la fraternité, et lui est donnée la même place qu’aux deux autres éléments de la devise républicaine (Liberté, Égalité, Fraternité). Est également reconnue la supériorité de ce principe sur certaines restrictions légales.

    La décision répondait à deux questions prioritaires de constitutionnalité soulevées devant la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans des procédures de délit d’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d’un étranger, concernant Cédric Herrou, agriculteur, et Pierre-Alain Mannoni, chercheur. Étaient en cause des dispositions du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, et des enjeux considérables pour l’action de ceux qui viennent au secours des migrants. Mais la portée de cette décision est très large, puisque la fraternité, valeur morale, voit sa juridicité pleinement reconnue : n’est-ce pas un bouleversement, et avec quelles conséquences ? Les développements qui suivent concerneront en fait essentiellement, outre le droit applicable au séjour des étrangers, directement visé par la décision du Conseil, le droit du travail, avec en mémoire la pensée chaleureuse et juste de Jean-Maurice Verdier, méditant sur « syndicalisme et fraternité », avec également le souci de ne pas céder aux contre-sens faciles sur une prétendue fraternité entre patrons et ouvriers, qu’aurait voulu instaurer, par exemple, la « doctrine sociale de l’Église ».

    S’agissant du droit de l’immigration, on serait tenté de dédier cette étude à tous ceux qui prennent le risque de porter secours, de l’entraide difficile, dans le Briançonnais, les Alpes de Haute-Provence… ou partout ailleurs. Un même élan caractérise des marins courageux, hommes et femmes, en méditerranée, et les militants occupés par les dossiers des sans papiers. Cet article restera cependant une ébauche, même en tentant de confronter la fraternité à quelques tendances du droit du travail.

    La réflexion sur les rapports du droit et de la fraternité est balisée : ouvrages de Marcel David sur les origines révolutionnaires, mais plurielles (3), de la fraternité, étude par Michel Borgetto de la devise républicaine (4) et des rapports de la fraternité avec la protection sociale, point de vue inspirant de Alain Supiot sur « la fraternité et la loi » (5), interrogations de l’historienne Mona Ozouf (6), notamment.

    Beaucoup plus modestement, la réflexion portera d’abord sur le concept de fraternité et la portée du principe juridique (I), puis sur les rapports entre fraternité, travail et syndicalisme (II)


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