Parmi les dix nouvelles que Marcel Aymé a publiées en 1943 dans le recueil Le Passe-muraille, « Légende Poldève » et « L’Huissier » évoquent particulièrement l’épisode du jugement dernier. Marcel Aymé renverse les représentations « sérieuses » du jugement dernier par un réinvestissement parodique. Les portraits caricaturaux de Saint Pierre et Dieu, l’attitude badine et désinvolte du héros Malicorne qui, admis à comparaître devant le Tribunal Suprême, n’hésite pas à mettre en cause le jugement prononcé contre lui, révèlent la visée satirique d’une réécriture subversive. S’inscrivant dans une longue tradition, la critique vise deux catégories de magistrats : le juge-bourreau, symbole de la justice injuste et inhumaine, et le juge formaliste, symbole de la justice procédurière factice et inefficace. Mais la parodie de l’épisode du jugement dernier permet aussi à Marcel Aymé de dénoncer la multiplication sous Vichy des juridictions d’exception et des Sections spéciales composées des juges « les plus répressifs ». On peut y lire un portrait charge de la politique vichyssoise antisémite et de la subordination du judiciaire à l’exécutif opérée par le maréchal Pétain.
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