L’usage du droit se traduit, dans la réalité sociale, par le recours aux modèles d’action ou de référence que proposent les normes juridiques. Or, le recours au droit intervient dans un contexte local, concret, spécifique et historiquement situé (Ewick et Silbey, 1998). Cet article présente les résultats d’une recherche qui avait pour but de documenter le rapport qu’entretiennent avec le droit du travail certaines catégories de travailleurs étrangers temporaires occupant des emplois qui requièrent un niveau réduit de formation. Sur le plan formel, cet ensemble régulatoire, qui a pour principale fonction la protection des salariés, s’applique intégralement à ces travailleurs, et ce, nonobstant leur statut migratoire. Toutefois, plusieurs travaux démontrent que ces travailleurs sont généralement moins enclins à dénoncer la violation de leurs droits au travail. Le droit du travail constitue-t-il un rempart utile pour ces travailleurs? À l’aide d’une méthodologie impliquant notamment une enquête de terrain, cette étude permet de mettre en lumière l’incidence du système d’emploi singulier dans lequel s’insèrent les travailleurs étrangers temporaires sur leur usage des ressources proposées par le droit du travail. Le recours à ces ressources n’est pas contingent et prédéterminé; il est inextricablement lié aux opportunités et aux contraintes avec lesquelles ces travailleurs composent. Cette recherche révèle également que les stratégies échafaudées par différents acteurs qui ne sont pas, sur le plan juridique, des parties au rapport salarial ont une incidence significative sur l’usage du droit; l’impact de celles-ci dépend largement du pouvoir dont ces acteurs disposent dans le système d’emploi.
In the social reality, law’s mobilization will translate by the resort to the action or reference models put forward by legal standards. Law’s mobilization intervenes in a local, concrete, specific and historically situated context (Ewick et Silbey, 1998). This paper presents the results of a research that sought to document the relation between “low-skilled” temporary foreign workers and labour law. Formally, these workers can benefit from the protection of labour law despite their migratory status. Many studies have however shown that they are generally less likely to report the violation of their labour rights. Does labour law constitute a useful bastion for these workers? Using a methodology involving a field study, this study pursues two objectives. On the empirical level, it allows to shed light on the impact of the singular employment system of these workers on their mobilization of labour law’s protections. Such mobilization is neither contingent nor predetermined; it depends on the constraints and on the opportunities arising from the employment system. Our research also reveals that strategies elaborated by actors who are not, from a legal perspective, parties to the employment relationship also have a significant impact on the way these workers take advantage of labour law’s resources; such impact largely depends on the power these actors have in the employment system.
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