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Sémantique de la coordination : une brève introduction

  • Autores: Christian Bassac
  • Localización: Revue de Sémantique et Pragmatique, ISSN 1285-4093, Nº. 24, 2008 (Ejemplar dedicado a: Sémantique de la coordination), págs. 7-23
  • Idioma: francés
  • Texto completo no disponible (Saber más ...)
  • Resumen
    • Après une longue période de faible activité, le champ de la coordination est devenu, depuis plusieurs années, un terrain de recherches et de débats beaucoup plus vivant. La thèse de Gérald Antoine sur la coordination en français, soutenue en 1952 mais publiée près de 10 ans plus tard, a fait date, mais sa gloire a été un peu ternie par les bouleversements théoriques de la linguistique des années 60. Sans être complètement oubliée, si l'on pense aux discussions sur la syntaxe des structures coordonnées dans le cadre de la grammaire générative, ou sur les liens explorés par les énonciativistes entre logique et grammaire, la question de la coordination n'a pas déchaîné les passions grammaticales. L'exception la plus notable est le remarquable ouvrage de Simon Dik Coordination, publié en 1968 et qui fut en même temps la première critique sérieuse de la grammaire générative, Le premier signe de réveil se trouve dans la revue Langue française qui publie en 1988 dans son numéro 77 un ensemble d'articles sous le titre doté d'une erreur célèbre : Syntaxe des correcteurs. Ce réveil trouve un écho dans le n°46 paru en juin 1990 de la revue L'information grammaticale sous le titre La coordination. Lyliane Sznajder, l'auteur de la présentation de ce numéro, y rappelle que l'opposition, en français, entre conjonctions de coordination et conjonctions de subordination ne remonterait qu'à 1888. Comme elle le rappelle opportunément, les anciens ne connaissaient qu'une seule catégorie de conjonctions, sundesmoi chez les grecs, coniunctiones chez les grammairiens latins. Sous une apparence vénérable et latinoforme, la coordination1 est une idée récente dans la tradition grammaticale en tant que concept autonome et distinct de la subordination. Encore faut-il noter que, précisément dans ces dernières années, la frontière entre les deux concepts syntaxiques a été fréquemment contestée. On peut avancer l'idée que, malgré les avertissements de Simon Dik, l'apparente simplicité de ce mode de jonction grammatical et son abstraction sémantique a pu faire croire à une forme d'universalité plate et basique qui ne laisserait attendre aucune découverte qui mérite une heure de peine. Pourtant le livre Coordination de Janne Bondi Johannessen, paru en 1998, a démontré de 1 Curieusement, ce terme ressemble à un décalque exact du mot grec suntaxis, ce qui ne simplifi e pas la genèse du concept, qui reste à faire. 26 Frédéric Lambert & Lionel Clément façon éclatante la diversité des phénomènes de coordination dans un très grand nombre de langues. Ce travail a fait redémarrer les études sur la coordination en montrant à quel point le phénomène était à la fois complexe et diversifi é. Les études, nettement plus nombreuses depuis, ont le plus souvent une richesse typologique qui contraste avec les premiers travaux. C'est le cas notamment des recueils publiés d'une façon accélérée depuis celui de Martin Haspelmath en 2004 : Godard/Abeillé 2005, Carston/Blakemore Lingua 2005, Bril/Rebuschi 2006, Rousseau et al. 2007. Si la diversité des procédés syntaxiques que l'on peut ranger sous le terme de coordination et la complexité des phénomènes sémantiques qui leur sont associés ont beaucoup progressé grâce à ces études, les mystères de la coordination sont loin d'être tous levés. Il est notable que, dans la présentation qui ouvrent leurs recueils respectifs, tant M. Haspelmath que A. Rousseau reconnaissent qu'il y a encore beaucoup à faire dans le domaine sémantique, tant les phénomènes sont complexes. Il n'est pas sûr que la syntaxe de la coordination soit mieux lotie. On en verra plus que des traces dans les articles que l'on va lire dans ce numéro, bien que son domaine d'investigation et de réfl exion soit en principe circonscrit, comme le titre l'indique, à la sémantique de la coordination. Car les différents articles réunis ici, qui ont tous été rédigés à peu près au même moment, à travers des différences de sujets et de conceptions, sans parler de leurs cadres théoriques, se sont révélés convergents au moins sur un point : les descriptions et les explications qu'ils proposent sont généralement multifactorielles, en ce sens qu'ils combinent, sans les confondre, plusieurs niveaux d'analyse linguistique. La sémantique n'est jamais envisagée ici comme un facteur d'explication isolé. C'est la façon dont les phénomènes sémantiques s'articulent, non seulement au lexique, au discours ou aux phénomènes énonciatifs, mais aussi à la syntaxe et même à la morphologie ou aux phénomènes intonatifs, et cela dans des approches souvent typologiques, ou au moins contrastifs, et associant données diachroniques et synchroniques, qui fait l'originalité des travaux ici présentés. Ce caractère multifactoriel ne débouche pas pour autant, du moins peut-on l'espérer, sur une quelconque confusion. Bien plutôt, il est peut-être le symptôme que la linguistique actuelle tend à devenir un peu moins doctrinaire et un peu plus empirique et pragmatique, si l'on peut dire. L'ensemble d'articles que nous proposons à nos lecteurs est l'aboutissement d'un travail collectif. Dans un premier temps nous avons procédé à un appel à contribution. Les contributeurs ont été sélectionnés par les éditeurs de ce numéro sur la base de l'orientation que nous souhaitions donner à ce recueil. Les articles ont été rédigés et ont donné lieu à une journée d'études qui a eu lieu à Bordeaux en octobre 2008, journée au cours de laquelle nous avons pu confronter nos points de vue et proposer des suggestions d'amélioration. C'est Présentation 27 à la suite des remaniements réalisés après cette journée que les articles ont été soumis au comité de lecture de la revue. Les articles publiés tiennent compte évidemment des remarques qui ont été transmises à leurs auteurs. Par ailleurs, les articles réunis ici respectent une caractéristique assez courante des études sur la coordination. Certains focalisent leurs investigations sur les marqueurs linguistiques de la coordination, jusqu'au cas limite de l'asyndète, qui n'a pas le même sens selon qu'une langue dispose ou ne dispose pas de marqueurs spécifi ques de la coordination. Les coordonnants sont alors conçus comme des modes d'articulation des éléments coordonnés, quels qu'ils soient, éléments lexicaux ou propositionnels. Les autres auteurs concentrent leur attention sur les éléments coordonnés eux-mêmes et plus précisément sur les phénomènes de parallélisme/non-parallélisme ou de symétrie/asymétrie. Il est clair que dans les cas d'asyndète le parallélisme est une forme de marquage coordinatif. Mais on peut alors l'envisager soit comme une forme de coordination soit comme une mise en parallèle (ce qui est pour certains la défi nition même du lien coordinatif). Quelle que soit la position que l'on adopte sur cette question, il nous a semblé opportun de classer les articles de ce numéro en fonction de ce critère. La première partie s'intitule donc Sémantique des marqueurs de la coordination, la seconde porte le titre de Sémantique des éléments conjoints dans les structures coordonnées. On trouvera ci-dessous un résumé des principaux apports des différentes contributions. 1. Sémantique des marqueurs de la coordination L'article de Carlotta Viti combine de façon originale une approche diachronique et une approche typologique de la sémantique de la coordination. Carlotta Viti montre, à partir d'une étude très fouillée des marqueurs de la coordination, que les langues indo-européennes anciennes avaient un système de coordonnants plus riche et assez différent de celui des langues indoeuropéennes modernes. Alors que celles-ci ont recours essentiellement à l'opposition illustrée par l'anglais and/or/but, les premières, dont les données s'appuient essentiellement sur l'indo-iranien, le hittite, le grec ancien et le latin, font jouer un nettement plus grand nombre de procédés de coordination : rôle dominant de l'asyndète dans les traditions orales, formes pronominales à valeur anaphorique, répétition du préverbe à valeur unifi catrice, diversité des particules coordinatives, dont la signifi cation apparaît plus raffi née et plus spécialisée. Non seulement la tripartition sémantique n'est pas systématiquement représentée dans les langues anciennes (par exemple la valeur oppositive, souvent remplacée par l'asyndète simple), mais certaines relations, comme la cause ou 28 Frédéric Lambert & Lionel Clément la conséquence, ont migré dans le domaine de la subordination dans les langues modernes. Parmi les nuances négligées par celles-ci on trouve l'opposition entre coordination naturelle et coordination accidentelle, où jouent, dans les langues anciennes, le contraste entre formes accentuées et formes clitiques des conjonctions. Une autre différence de traitement concerne l'opposition entre coordination symétrique et asymétrique, où les langues anciennes rejoignent les langues slaves et baltiques, plus archaïques. Katja Jasinskaja et Henk Zeevat proposent une description contrastive des emplois de and et but en anglais et de i, a, et no en russe. Partant du constat purement structural que le même ensemble syntaxico-sémantique est occupé par deux marqueurs en anglais et trois en russe, ils étudient les frontières respectives et les correspondances entre les marqueurs des deux langues. Le travail se situe dans une perspective pragmatique d'analyse du discours, où le rôle crucial appartient à la détermination du thème. Celui-ci est défi ni comme une réponse à différents types de questions. Alors que and et i proposent une forme d'addition en rapport avec un thème dépendant du contexte et en correspondance avec une question simple (par exemple qu'est-ce qui s'est passé ?), a comporte un thème qui relève d'une question à double interrogation wh (par exemple Qui a eu combien ?). En ce qui concerne but et no, les auteurs montrent que ces deux marqueurs partagent deux emplois similaires, le démenti d'une attente et la fonction dite argumentative, alors que l'opposition qu'ils nomment sémantique peut seulement s'exprimer par but. L'explication proposée est que a et no ne répondent pas au même type de question sur le thème : la première conjonction, comme le but anglais, répond de façon double à une double question oui/non et wh-, alors que la seconde s'est spécialisée dans la réponse à la question oui/ non et pourquoi ? La démonstration s'appuie également sur des phénomènes intonatifs. De façon élégante il est ainsi montré comment le système de l'anglais et celui du russe se recouvrent et se distinguent en assignant des rôles partiellement semblables à ces marqueurs de coordination conçus comme des procédés de gestion des thèmes discursifs. Anna Orlandini et Paolo Poccetti analysent, dans les langues anciennes, les conditions sémantiques qui président aux réalisations des différentes marques de la coordination. L'étude montre la grande richesse des marqueurs de la coordination dans ces corpus, en particulier en latin et le lien ténu entre la diversité lexicale de ces marqueurs et la richesse des relations sémantiques de la coordination. Plusieurs types de liens de coordinations sont systématiquement étudiés : le lien de type comitatif, le lien connectif, le lien disjonctif et enfi n le lien adversatif. L'approche proposée est faite par niveaux sémantiques. Le niveau le plus bas est l'organisation textuelle où les relations entre propositions Présentation 29 sont symétriques et réversibles avec des marqueurs de transition. A ce niveau, les rapports de coordination sont conformes aux opérations logiques. Aux niveaux plus élevés, épistémique et illocutoire, actes de langage, etc., ces opérateurs logiques sont mis en échec, et les relations sont le plus souvent aux frontières de la coordination, asymétriques, les propositions sont dans un rapport de subordination, les connecteurs sont des marqueurs adverbiaux. L'article de Frédéric Lambert porte spécifi quement sur la conjonction OU en français. L'auteur montre que cette conjonction, moins fréquente et moins étudiée que le canonique marqueur de coordination ET, présente des propriétés qui en restreignent les contextes dans lesquels il apparaît. La position syntaxique sujet est par exemple diffi cile pour une coordination en OU, car la partie thématique d'un énoncé est peu compatible avec la disjonction qu'introduit le marqueur. Différents emplois de OU sont examinés, et leur analyse montre que les valeurs exclusives et inclusives de OU couramment admises comme intégrateurs doivent être réexaminées. Deux cas sont contrastés : le premier correspond à une forme non marquée de OU, et revient à faire référence à une extension du premier terme conjoint. Le second correspond aux formes marquées de OU : OU BIEN, OU ALORS, etc. qui supposent une alternative dans un espace clos de possibles. Cette interprétation du contraste entre OU inclusif et OU exclusif prend une certaine distance avec la proposition logicienne, et cela sur la base de données empiriques. 2. Sémantique des éléments conjoints dans les structures coordonnées Caterina Mauri étudie sous tous ses aspects la question du parallélisme dans le cas de la coordination entre propositions. Son approche prend en compte quatre niveaux de représentation: un niveau conceptuel cognitif (celui correspondant à l'événement), un niveau pragmatique (celui de l'acte illocutoire), un niveau sémantique (combinaison, contraste et alternative) et un niveau syntaxique (ici celui des structures propositionnelles). Chacun de ces niveaux est caractérisé par une forme de symétrie ou de parallélisme. S'appuyant sur des données typologiques assez étendues portant sur 74 langues, elle montre comment les cas où le parallélisme syntaxique peut être en défaut coïncident avec les cas de moindre parallélisme sémantique. Ainsi, selon Caterina Mauri, alors que les relations de combinaison (type et) et de contraste (type mais) peuvent donner lieu à une certaine dissymétrie sémantique, ouvrant la voie à une dissymétrie syntaxique, la relation exprimant l'alternative, et fondée sur la non-co-occurrence 30 Frédéric Lambert & Lionel Clément des événements correspondant aux propositions coordonnées, repose de façon beaucoup plus stricte sur une mise en parallèle, ce qui se manifeste par un parallélisme syntaxique beaucoup plus général et plus strict. Anne Abeillé et François Mouret comparent deux types de coordination de phrases en français qui présentent une ellipse : le " gapping " et le " right node raising ", traduits par " constructions trouées " et " la mise en facteur à droite ". Les analyses syntaxiques et sémantiques de ces phénomènes montrent qu'il ne s'agit pas d'une variante d'une même construction, comme cela a été remarqué pour l'allemand et l'anglais. Les auteurs montrent que la reconstruction de l'ellipse est possible et justifi ée en syntaxe seulement pour la " mise en facteur à droite ", et que dans les " constructions trouées " elle ne peut être envisagée qu'en sémantique. Les auteurs explorent dans le détail les contraintes syntaxiques, sémantiques et discursives de ces constructions asymétriques. Les " mise en facteur à droite " supportent assez bien une analyse avec reconstruction syntaxique et sémantique de l'ellipse. En revanche, les " constructions trouées " imposent un ensemble de contraintes sémantiques, discursives et pragmatiques, en particulier celles de parallélisme, qui contrastent les éléments réalisés des phrases complètes et des phrases incomplètes. Cette analyse est proposée dans le cadre d'une grammaire HPSG du français. Ce formalisme linguistique se prête bien à une analyse où il s'agit d'articuler l'ensemble des contraintes sémantiques et syntaxiques qui contrastent les deux constructions elliptiques. Mehmet Cicek et Christian Bassac présentent une étude sur la factorisation des affi xes en turc, dans le cas limité des affi xes possessifs et pluriels des coordinations de noms. Dans ce cas précis, un phénomène apparaît qui contredit les prédictions grammaticales classiquement entendues selon lesquelles les deux affi xes de pluriel et de possessif se factorisent ensemble. Les contraintes permettant de factoriser le possessif seul des noms coordonnés sont de nature sémantique. Après avoir donné le contexte de réalisation de ces factorisations, l'hypothèse formulée par les auteurs porte sur l'expression du générique exprimé par un affi xe pluriel. S'appuyant sur une formalisation en Lexique Génératif, cette hypothèse correspond au phénomène régulièrement observé sur les données. Les auteurs montrent ainsi, entre autres choses, que la morpho-syntaxe du turc est sensible à la sémantique des noms, notamment de l'opposition entre prédicat " stage level " et " individual level ". Enfi n, dans son étude sur le zeugme sémantique, Lionel Clément propose une analyse de ces constructions coordonnées qui semblent correspondre formellement à des mises en facteur commun d'un prédicat alors même que le Présentation 31 rapport sémantique entre l'élément commun et ses arguments est radicalement différent, comme dans la formule de Martin du Gard "[�] enfermée dans sa chambre et dans sa surdité ". Après avoir montré que l'ellipse ne permet absolument pas d'expliquer ces structures, Lionel Clément, dans le cadre de la théorie Lexical-Functional Grammar, propose un procédé permettant de reconstruire le prédicat coordonné à partir de ce qu'il nomme une " capture lexicale " de l'antécédent. La nature polysémique de l'antécédent sert à la reconstruction, soit de l'antécédent lui-même soit d'un nom prédicatif accompagnant un verbe support, soit d'un prédicat à reconstruire, soit d'une expression fi gée. Le zeugme sémantique apparaît ainsi comme une forme d'actualisation de substitution, qui s'interprète sur une base énonciative. Il serait évidemment présomptueux d'estimer que ces huit contributions répondent à toutes les questions que nos prédécesseurs immédiats avaient laissées en suspens. Nous espérons néanmoins que les propositions qu'ils contiennent aient fait un peu avancer la connaissance de la sémantique coordinative et qu'elles suscitent à leur tour le désir de prolonger certaines des pistes amorcées ici. Frédéric Lambert et Lionel Clément 32 Frédéric Lambert & Lionel Clément Références Antoine, Gérald, 1952, La coordination en français, Paris, Éditions d'Artrey, 1959- 1962, 2 volumes Bril Isabelle et Georges Rebuschi (éds), 2006, Coordination et subordination : typologie et modélisation. Faits de Langue 28. Paris: Ophrys. Carston, Robyn et Diane Blakemore (2005) Lingua: numéro spécial: Coordination: Syntax, Semantics and pragmatics. Dik, Simon, 1968, Coordination, its implications for the theory of general linguistics. Amsterdam, North-Holland Publishing Company Godard, Danièle et Anne Abeillé (eds). 2005. La Syntaxe de la Coordination, Langages 160, Paris: A.Colin Gross, Gaston et Mireille Piot, 1988, Syntaxe des correcteurs, Langue française no77 Haspelmath Martin (éd.) 2004, Coordinating constructions. Amsterdam: John Benjamins. Rousseau André, Louis Begioni, Nigel Quayle et Daniel Roulland (dir.), 2007, La coordination. Presses Universitaires de Rennes Sznajder Lyliane, 1990, La coordination, numéro spécial de l'information grammaticale, n°46


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