Mary-Annick Morel Université Paris III - EA 1483 Recherche sur le français contemporain
Intonation, Regard et Genres dans le dialogue à bâtons rompus
Je souhaiterais développer ici des hypothèses nouvelles sur la nature et la fonction des indices intonatif s г dans la détermination des « genres » identifiables dans les dialogues dits « à bâtons rompus », en les mettant en relation avec la structure interne des paragraphes et avec la direction de la tête et du regard. Les dialogues à bâtons rompus se caractérisent par l'extrême variabilité des genres mis en œuvre.
1. Cf. M.- A. Morel et L. Danon-Boileau, 1998 (abrégé GI).
1. Valeur iconique des indices intonatifs
J'ai choisi d'appeler « parleur patenté » l'énonciateur de plein droit à un moment particulier de l'échange et « écouteur » son interlocuteur. L'écouteur (dans un dialogue entre Français du moins) ne reste pas passif et muet, mais, au contraire, il jalonne son écoute de productions sonores, allant du simple « m » ou « mm » et de l'interjection primaire « ah », au jugement de valeur syntaxi- quement construit « mais c'est laid Bilbao », en passant par des interjections plus élaborées « ah bon /oh la la » ou des syntagmes qualifiants « oh le mytho ».
Selon la théorie développée à Paris III, les indices intonatifs sont spécialisés et présentent chacun une valeur iconique propre. Une attention particulière est portée à la manifestation de deux niveaux de représentation de celui à qui cette parole est adressée : 1) le niveau coénonciatif qui amène le parleur patenté à anticiper la pensée de l'autre (convergence de points de vue, objections possibles...), 2) le niveau colocutif qui amène le parleur à anticiper une éventuelle prise de parole de l'écouteur. Selon ces hypothèses, c'est la représentation de l'écouteur comme coénonciateur qui entraîne des variations de la mélodie (FO),
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