LE SOLDAT NOIR AU PÉROU (XVIe-XVIIe SIÈCLES)

Jean-Pierre TARDIEU Université de la Réunion

De tout temps, les esclaves furent forcés d'épouser les causes et les querelles des maîtres. Cela fut particulièrement vrai au Pérou, pendant la conquête, les guerres civiles et la résistance face à l'ennemi extérieur.

La tradition militaire, qui voyait dans les esclaves des auxiliaires indignes de l'honneur du combattant, subit des entorses. La rupture fut le fait des rebelles à l'autorité royale, poussés par la nécessité. Si l'administration eut toujours des scrupules à admettre le Noir comme soldat à part entière, la crainte des pirates anglais et hollandais l'obligea cependant à accepter la création de milices noires et mulâtres, composées, il est vrai d'hommes libres. Que représentait pour eux cette promotion ?

I. Conquête et guerres civiles

1. Les armées des conquérants

Dans toutes les expéditions entreprises depuis Panama par les deux conquistadores Francisco Pizarro et Diego de Almagro, il y avait plusieurs Noirs1. L'un d'eux plongea d'ailleurs les Indiens de Tûmbez dans la stupéfaction en 15322. Ce n'étaient pas de véritables soldats, mais plutôt des serviteurs, à la fois domestiques et valets d'armes.

Les premières licences d'esclaves accordées par la Couronne aux conquérants du Pérou sont claires à cet égard. Le trésorier Alonso Riquelme, le contrôleur royal Garcia de Salcedo et le comptable Antonio Navarro eurent droit par exemple,