LA PLACE DE L'HISTOIRE DANS L'INTERPRÉTATION DES PAYSAGES VÉGÉTAUX

Jean- Jacques DUBOIS Université de Lille I

Après le développement des méthodes d'étude quantitatives de la végétation ou des classifications du paysage d'inspiration structuraliste, qui analysent surtout des dynamiques spatiales, il semble nécessaire de réintroduire la durée, et toute son "épaisseur" historique dans l'étude des paysages végétaux. Le biogéographe préoccupé par leur histoire peut situer son ambition à deux niveaux différents :

- pour les quatre ou cinq derniers siècles, la biogéographie historique stricto sensu procède à une analyse régressive en partant des paysages végétaux actuels, où elle identifie les héritages, les éléments fossiles ou reliques, puis les séquences évolutives, par l'interprétation des sources archivistiques et iconographiques ;

- en cherchant à maîtriser la longue durée historique, X&paléobiogéographie et Yécologie historique ont recours aux méthodes de Yarchéologie du paysage, notamment aux marqueurs paléo-écologiques que sont le charbon de bois et le pollen.

Il convient toutefois de signaler les limites de la palynologie et de l'anthracologie : "l'image fournie par les variations en pourcentage des taxons végétaux est trompeuse". Limites dans l'espace : tout dépend des conditions station- nelles précises du site, à un moment donné. Limites dans le temps : le calage des datations absolues au 14C par rapport à la chronologie historique est approximatif. De même, la botanique et l'écologie, lorsqu'elles sont mises au service de l'histoire, appellent une grande prudence dans l'interprétation des cortèges floristiques. Dans l'état actuel des travaux, et malgré les remarquables synthèses des archéologues britanniques, il n'est pas possible de parvenir, en Europe occidentale, à une certaine généralisation quant aux espèces végétales ayant une valeur indicatrice. Seuls des inventaires locaux, menés dans le cadre de régions naturelles homogènes, permettent de bien connaître les relations entre la flore et les structures archéologiques dans les paysages végétaux.