MORISQUES ET CHRETIENS A FAURA AU XVIe SIECLE

Par Bernard VINCENT Ancien Secrétaire Général de la Casa de Velazquez

Faura est au milieu du XVIe siècle un village tranquille du pays valencien. Rien ne le signale à l'attention. Au moins en apparence. Pourtant la vie quotidienne y est bouleversée à partir du mois de juin 1550 du fait de l'accusation que l'Inquisition porte contre son seigneur, Joan de Villarasa. Le long procès — onze ans jusqu'en décembre 1561 — qui commence alors étale au grand jour des tensions insoupçonnées et des problèmes aigus qui dépassent singulièrement le cadre de la petite communauté impliquée tout à coup dans une affaire retentissante. La question morisque y a fait irruption.

Faura présente cependant deux particularités qui ont — nous le verrons — quelque importance. Cette localité aux dimensions réduites est fort proche de la mer. Située à quelque trente kilomètres au nord de Valence et à cinq à peine de Sagonte (alors Murviedro), elle n'est séparée de la Méditerranée que par une étroite bande littorale. La zone où se trouve Faura, largement ouverte à tout ce qui vient du large est un lieu privilégié pour les embarquements et les débarquements. La population vieille- chrétienne qui y réside vit en permanence sous la menace des incursions barbaresques. La population morisque peut au contraire être un relais efficace ou un précieux allié pour les corsaires.

On sait que le Royaume de Valence comprend vers 1565-1572, époque postérieure à l'affaire qui nous occupe, 64 075 feux ; 70% d'entre eux sont habités par des vieux-chrétiens, 30% par les morisques ou nouveaux- chrétiens descendants des musulmans contraints à la conversion entre 1521

Mélanges de la Casa de Velazquez. (M.C. V.), 1986, t.XXII, p. 157-169.