L'EMPREINTE CASTILLANE SUR LES PAYSAGES DES HAUTS PLATEAUX GRENADINS

Par André HUMBERT Membre de la Section Scientifique.

Comment une civilisation conquérante engendre-t-elle de nouveaux paysages? Comment s' adapte- t-elle aux multiples résistances que lui opposent, dans l'espace conquis, les structures existantes? Et comment laisse- t-elle finalement son empreinte — inégale mais indélébile — , plusieurs siècles après la conquête?

On sait qu'une des conséquences de la conquête — la Reconquête — du Royaume de Grenade par les Castillans a été l'occupation des terres qui avaient été aménagées depuis le VIIIe s. par les Musulmans. Cette occupation* qui s'est faite en deux étapes, est devenue totale après l'expulsion des Morisques. Cinq siècles après, quelles marques sont encore visibles dans un paysage aussi radicalement investi?

Ce problème, je l'ai évoqué dans la conclusion d'un article récent l consacré à l'aménagement systématique des parcellaires sur les hauts plateaux grenadins. J'émettais l'hypothèse que ces schémas d'organisation avaient été importés au XVIe s. par des céréaliculteurs castillans. Il me paraît intéressant d'approfondir à présent cette réflexion. Pour ce faire, il convient, non seulement de s'attacher à- une observation plus minutieuse de tous les éléments constitutifs des paysages de l'espace de référence (les hautes terres situées au nord-est de Grenade), mais encore d'établir des comparaisons avec d'autres espaces témoins (voir fig 1).

Mais pour que ces comparaisons soient fructueuses il est nécessaire de leur donner une profondeur historique; il me semble, du reste, qu'un cheminement régressif vers le moment où s'est produite la rupture, est le plus propre à nous faire prendre toute la mesure d'une empreinte castillane sur les paysages ruraux de Valtiplano grenadin.

Les paysages ruraux des hauts plateaux grenadins

C'est au coeur des hautes terres (1.100-1.200 m) situées entre la Sierra Arana, au sud, et les massifs calcaires de la province deJaén (Sierra Mâgina)