Le monastère de San Roman de Entrepenas, dans le nord de l'actuelle province de Palencia, et dans l'ancien diocèse de Leôn, est très probablement une fondation mozarabe du Xe s., issue du courant migratoire vers l'Espagne chrétienne septentrionale de ces autres chrétiens soumis à la domination de l'Islam d'Al Andalus. Dans un procès tardif de la chancellerie de Valladolid, l'on vient de trouver un folio en écriture wisigothique anda- louse très primitive (vne-ixe s.) avec un fragment des Moralia de Grégoire le Grand. Cet unique vestige de la vie spirituelle de ces chrétiens, par le hazard d'une survivance manuscrite dans la documentation juridique et économique, nous rappelle la phrase de Mommsen sur les témoins historiques

de cette nature, le signal d'une ville antique submergée sous les fonds marins... San Roman, réduit en prieuré, a perdu au cours du xne s. une partie de son éclat, la contrée elle-même s'est dépeuplée, ses habitants émigrant vers le sud, avec l'avancée de la reconquête et la réoccupation du désert du Duero. Devant l'incapacité de sa communauté à assurer le culte, le Saint-Siège l'a agrégé à San Zoilo de Carriôn en 1446. Mais on peut se faire une idée de son pouvoir quand on sait qu'il exerçait son droit de patronage sur six paroisses du diocèse (aucun autre monastère diocésain n'exerçait ce droit sur deux paroisses, seulement sur une pour les plus privilégiés), et avec les hidalgos (petite noblesse locale) sur trois autres. Onze villages étaient tributaires du monastère (d'après le Becerro de las Behetrias). Et, plus étonnant, tous les clercs de l'archiprêtré devaient annuellement une procuration et à l'évêque et à l'abbé de San Roman. Dans la bibliographie, l'on cite heureusement Yepes et Pérez de Urbel pour l'histoire monastique, mais il faut tenir compte des apports postérieurs.

Les documents publiés sont au nombre de 227. Après l'annexion de San Roman à San Zoilo, les archives des deux monastères se mélangèrent, ce qui a nécessité des éditeurs une sélection préalable, même si la plupart des documents ont été transférés à l'Archivo Histôrico Nacional de Madrid. C'est avec un soin tout particulier que les éditeurs ont recherché les documents falsifiés et les interpolations de certains documens authentiques, insistant sur la nécessité de faire une étude approfondie des faux médiévaux en Espagne, tout en reconnaissant la difficulté du travail, due à l'indépendance de chaque centre dans sa façon d'agir. Quant aux interpolations, elles montrent que les documents des IXe et Xe s. avec des limites très concrètes de terres font l'objet de soupçons, étant donné qu'il était courant d'ajouter postérieurement ces limites aux documents qui ne contenaient qu'une nomination générique des biens.

Avant le xme s., il n'y a que trois documents patrimoniaux dont le monastère est le destinataire direct. Par la suite, ce sont essentiellement des donations pro anima, et des chartes de familiarité avec le monastère, converti de ce fait en une entreprise d'assurances contre la maladie et la vieillesse. Les efforts pour maintenir le culte sont visibles dans certains contrats avec des clercs desservants. Les privilèges royaux sont généreux, malgré les restrictions générales interdisant le changement de juridictions des terres et des vassaux. Il existe aussi des cas d'interférence dans les pou-