Couverture fascicule

Peter F. Dembowski — La Chronique de Robert de Clari. Étude de la langue et du style

[compte-rendu]

doc-ctrl/global/pdfdoc-ctrl/global/pdf
doc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/resetdoc-ctrl/global/reset
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
Page 70

COMPTES RENDUS

, i6°, 141 pp. (« Univ. of Toronto Romance Séries », 6).

L'auteur se propose de montrer, en s'appuyant sur des faits de langue et de style, que, tout en étant un écrivain sans expérience qui s'adressait à un public local peu cultivé, Robert de Clari n'a pas été sans subir des influences littéraires et qu'il n'est pas le naïf spontané que certains critiques ont voulu faire de lui. M. Dembowski, professeur à l'Université de Toronto, indique clairement dans son introduction l'attitude critique qu'il a adoptée : il a voulu éviter tout impressionnisme, « convaincu que le mélange d'objectivité (traitement traditionnel de la langue) et de subjectivité (traitement usuel du style) tend fatalement à donner une image fausse de l'œuvre étudiée ». C'est donc dire que nous nous trouvons devant une étude surtout descriptive et linguistique où les considérations d'ordre esthétique, qui ne sont pas absentes, passent au second plan.

L'ouvrage se divise en cinq chapitres. Les trois premiers sont consacrés respectivement à la phonétique, à la morphologie, à la syntaxe et au vocabulaire. Le quatrième traite du style compris comme étant l'ensemble des moyens de mise en relief. Quant au cinquième, ce n'en est pas un puisqu'il s'agit de « Conclusions générales ». Une bibliographie et un index des mots et des questions étudiées terminent le volume.

Les chapitres 1 et 11, qui s'adressent surtout au spécialiste, contiennent une étude détaillée du dialecte picard tel qu'on le trouve dans la Conquête de Constantinople, c'est-à-dire contenant un certain nombre d'éléments franciens. Alors que la phonétique et la morphologie de l'œuvre indiquent une origine dialectale et populaire, la syntaxe est fortement influencée, en revanche, par la tradition littéraire. M. Dembowski explique cette apparente contradiction tout d'abord en refusant, avec raison, d'établir une relation trop étroite entre « dialectal » et populaire, puis en faisant remarquer que l'influence littéraire s'exerce en premier lieu et beaucoup plus normalement sur la syntaxe que sur la phonétique et la morphologie : « C'est précisément dans le domaine de la syntaxe qu'un écrivain sans expérience suit la langue littéraire, car, nous semble-t-il, la syntaxe, c'est le domaine le moins inconscient de la langue. »

Quant au vocabulaire de Robert de Clari, il est relativement pauvre, et même insuffisant pour rendre compte des réalités esthétiques et psychologiques. On trouve plusieurs développements intéressants dans ce chapitre ni, mais celui qui est consacré à la sémantique du couple croisié /pèlerin n'est peut-être pas tout à fait convaincant. S'appuyant sur le fait que le mot croisié disparaît complètement après le début du premier siège de Constantinople (XLIII, 1) pour faire place à pèlerin, M. Dembowski soutient que le premier terme aurait été réservé à des soldats « en puissance », tandis que le second aurait désigné des soldats de facto.

Le chapitre sur le style constitue certainement la partie la plus attrayante et peut-être la plus importante du livre, car il n'existe aucune monographie sur le style de Robert de Clari. La méthode utilisée, nous l'avons déjà remarqué, consiste à faire une étude objective de l'ensemble des procédés grâce auxquels l'auteur met en relief certaines parties de son message. Robert de Clari n'aurait subi aucune influence directe de la littérature latine, sa phrase étant simple et courte. Il est probable qu'il emprunte ses procédés de mise en relief, qui se réduisent pour l'essentiel à la répétition et au discours direct, aux « chansons de geste, aux romans et aux chroniques rimées ». M. Dembowski conclut : « Au lieu donc de souligner la naïveté (au sens de « spontanéité enfantine ») de Robert, il vaut mieux insister sur le fait que : i° Robert était un écrivain sans expérience ; 2° il écrivait à une époque où la forme de la prose n'avait pas encore été élaborée, c'est-à-dire à une époque où un écrivain comme lui ne pouvait trouver de modèles convenables à imiter. »

II faut, en terminant, signaler quelques faiblesses de forme. Bon nombre d'accents ont été ignorés par le typographe, et des fautes d'orthographe se sont glissées ça et là. Les mots grecs cités ne sont pas accentués. « Hymne » est employé au masculin alors qu'il s'agit d'un poème religieux chanté d'usage liturgique. Plus grave est l'emploi de certains mots comme « savantisme », « prédominamment », « émotionnelle », et surtout « discussion » et « discuter » dans le sens d'« étude » et « étudier ». Enfin toute une longue phrase de la page 34 (« Ces pronoms sont affaiblis... ») est incompréhensible.

doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw