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Joseph H. Reason. — An Inquiry into the Structural Style and Originality of Chrestien's « Yvain ».

[compte-rendu]

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Joseph H. Reason. — An Inquiry into the Structural Style and Originality of Chrestien's « Yvain ». Washington, Catholic University of America, 1958, in-8°, 103 pp. (« Stud. in Romance Lang. and Lit. », 57).

On s'accorde généralement à considérer que le Chevalier au lion est le roman le mieux écrit, et peut-être aussi le mieux composé, de Chrétien de Troyes. L'entreprise de M. Reason était justifiée, mais nous sommes obligé d'avouer, en terminant la lecture de son ouvrage, qu'il reste bien des choses à dire sur le style et la conjoncture des romans de Chrétien et de Y Yvain en particulier.

Le principal point de vue choisi par M. Reason est celui de la « tripartition », de ce rythme ternaire que l'on décèle facilement dans le groupement des aventures comme dans les détails du style. La majorité des critiques divisent en effet Y Yvain (comme d'ailleurs YÉrec et, à un degré moindre, les autres récits de Chrétien) en trois parties, que nous pourrions appeler l'exposition de la thèse, la révélation de l'antithèse, la quête de la synthèse. Le héros parcourt brillamment une première étape, marquée par la conquête d'une femme. Mais l'amour comblé, loin d'être une fin, met le héros aux prises avec une douloureuse alternative : vie conjugale paisible (et danger de se laisser aller à la recreantise) ou poursuite des aventures, véritable raison d'être du chevalier. La résolution de cet antagonisme sera difficile (il est plus facile de trouver une femme que de se trouver soi-même) : elle constituera la partie la plus importante du roman. Voilà donc trois parties bien nettes (quoique de longueur inégale), mais cette division tripartite n'est absolument pas propre à Y Yvain.

Les romans en vers de notre moyen âge fourmillent d'accumulations de mots, souvent synonymes, et il n'est rien d'étonnant à ce que les termes soient groupés trois par trois. M. Reason ne ménage pas sa peine pour nous persuader que les triplets sont particulièrement nombreux dans Y Yvain et il en cite une foule d'exemples, qu'il s'agisse de substantifs : li sain, li cor et les buisines (v. 2350 de l'éd. Roques), robe veire, cote et mantel (2970), etc., — de verbes : or te pri et quier et déniant (364), qu'ele esperone et point et broche (6036), etc., — d'adjectifs : li sans chauz, clers etvermaus (1180), de pes agus, reonz et gros (5186), etc. Il est trop évident que la majeure partie de ces triplets sont dus aux exigences de la versification, qu'ils viennent spontanément sous la plume de l'écrivain qui rédige en octosyllabes. A parcourir seulement les 200 premiers vers de YÉrec ou du Lancelot, on les trouve certainement en aussi grand nombre : hardiz et conbatanz et fiers (Érec, v. 32 de l'éd. Roques), molt estoit biax et preuz et genz (89), corent, angressent et abaient (121), ne cor, ne chaceor, ne chien (132) ; chevaliers, dames et puceles (Lancelot, même éd., v. 53), orguel, outrage et desreison (186), mate et dotante et sospiranz (206), etc. Et Chrétien n'est pas une exception : un rapide sondage dans les œuvres de ses contemporains serait tout aussi rentable. Comment affirmer, surtout, que ces triplets témoignent de la hantise d'un quelconque symbolisme ternaire ou trinitaire ?

La « tripartition » des éléments du récit ne doit guère davantage retenir notre attention. Dans quel roman ne peut-on trouver un cor qui sonne à trois reprises, un voyage de trois jours (et un tournoi !), une conversation à trois ?

Le chapitre sur la « Structural Gradation » est à peine plus convaincant. Qu'une progression soit marquée entre les différents combats d' Yvain, c'est bien évident, mais elle ne l'est pas moins entre ceux d'Érec, entre les aventures qui permettent à Perceval de conquérir le los du monde et sa propre personnalité.

La comparaison que M. Reason entreprend ensuite entre la «texture» de Y Yvain et celle de son parallèle gallois, le « mabinogi » d'Owen, est en partie guidée par la même préoccupation de dépister les « triades », bien plus nombreuses, il va de soi, chez le versificateur français que chez le prosateur gallois.

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