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Le Mystère d'Adam (Ordo representacionis Ade). Texte complet du manuscrit de Tours

[compte-rendu]

Année 1963 6-22 pp. 181-182
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COMPTES RENDUS

Le Mystère d'Adam (Ordo rcpresentacionis Ade),éd. Paul Aebischer. Texte complet du manuscrit de Tours. Genève, Droz et Paris, Minard, 1963, 160, 122 pp. (Textes littéraires français, 99).

L'édition du Mystère d'Adam que nous a donnée M. Aebischer s'en tient rigoureusement au manuscrit 927 de la Bibl. Municipale de Tours, examiné sur place à plusieurs reprises par le savant éditeur. Elle est préférable à l'édition Chamard qui ne contient pas la scène de Caïn et Abel ni la Procession des Prophètes, préférable aussi à l'édition Studer, victime de trop nombreuses émendations (les éditions Luzarche et Grass sont épuisées).

I/introduction (p. 7-25) s'ouvre sur une discussion de la valeur des « éditions », se poursuit par une étude du « manuscrit » pour en arriver à des précisions sur ce qu'a pu être le « texte ». Le manuscrit est d'origine provençale, surtout du fait qu'il est écrit sur du papier de caractère hispano-arabe, et non pas sur du parchemin. Il a appartenu très probablement à la bibliothèque du château de Sault, dans le Sud-Est de la France, et on peut le dater de 1225/50. Ce sont là les résultats des recherches de M. Marichal (pour la date), de M. H. Gachet (pour les détails papyrographiques) et de M. A. Aymard (pour l'histoire du manuscrit) acceptés par l'éditeur (p. 14-18). Le modèle sur lequel aurait été copié le manuscrit serait d'origine normande plutôt qu' anglo-normande et, à en juger par la qualité des rimes, ce modèle aurait été composé vers 1150 (p. 18-19).

M. Aebischer n'a introduit une correction que lorsqu'elle s'imposait, dans les cas où il s'agissait de graphies manifestement corrompues ; il a muni le texte d'une ponctuation moderne ; il a utilisé les u et les v, les i et les / selon l'usage moderne ; il a reproduit toujours en entier les noms des acteurs et, lorsqu'un nom a été omis, ce nom est placé entre crochets.

Quant à la troisième partie du Mystère, la Procession des Prophètes, l'éditeur, si peu enclin à des interprétations qui s'éloigneraient de la lettre, s'est pourtant résigné à une hypothèse. La première partie, le drame de la Faute originelle, se terminant par la scène où les diables emmènent Adam et Eve en enfer, et la seconde partie, le drame du Premier crime, ayant comme épilogue la scène où Caïn et Abel se voient traités de la même manière, la Procession des Prophètes logiquement a pour but d'annoncer la venue du Rédempteur et le rachat d'Adam et de sa race. M. Aebischer estime qu'il manque une suite dans laquelle les prophéties se seraient réalisées, c'est-à-dire une « Nativité » (postulée déjà par Grass), mais aussi une « Passion » et une « Résurrection ». \JOrdo Ade ne saurait acquérir autrement son plein sens (p. 20). Conscient que cette suite lui manquait, le copiste du ms. 927 aurait donc imaginé de terminer la représentation par la récitation du dit des Quinze signes du Jugement. Ce dit, dont la forme linguistique n'est pas identique à celle du reste du drame, aurait eu le but d'exposer les conséquences des péchés que, malgré la Rédemption, les hommes commettront au cours des siècles à venir (p. 23).

Il saute aux yeux que l'eschatologie menaçante des Quinze signes est en désaccord avec la note finale de consolation que l'on se croirait en droit d'attendre. Cette fin sévère aurait-elle été ajoutée pour inspirer une crainte salutaire, théologique, au dernier moment ? Oui, sans doute, mais à juste titre, car, dans les scènes qui précèdent, Adam, Eve, Caïn et Abel, tout en tremblant, gardent un certain air de gentillesse quasi courtoise et presque mondaine. L'esprit féodal s'est glissé dans le Mystère. M. K. Urwin (dans « Modem Lang. Review », t. XXXIV, p. 71) et M. W.C. Câlin (ibid., t. LVIII, p. 172) l'ont bien remarqué. Féodal et même courtois, Abel propose à son frère qu'ils se gardent d'être vilains (594) et que leur offrande à Dieu soit « del meillor » (651). La supériorité morale d'Abel consiste aussi en ce qu'il est imbu de largesse, la vertu par excellence du chevalier courtois. Caïn, d'autre part, ne compte

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