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Colonel Rocolle. — Deux mille ans de fortification française

[compte-rendu]

Année 1974 17-66 pp. 181-182
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, 2 vol. 40, xxiv-366 et 262 pp., plus de 200 fig. et plans.

Ceux des archéologues qui reçurent une éducation d'historien ont besoin de collaborateurs et de concurrents rompus à d'autres disciplines : architectes, ingénieurs, artistes, etc. L'apport des militaires n'est pas moins utile dans le domaine qui fait l'objet de ce compte rendu. Le colonel Rocolle a entrepris de retracer l'évolution de la fortification française depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours. D'où un copieux ouvrage dont le second tome est uniquement réservé aux illustrations, à la bibliographie et aux tables. Je n'en retiens que les chapitres correspondant au programme des « Cahiers de civilisation médiévale », c'est-à-dire approximativement aux siècles x à xn.

I/auteur a beaucoup lu et peut-être beaucoup vu, mais il n'a pas tiré tout le parti souhaitable de ses sources et l'on pourrait citer bien des travaux importants qu'il n'a sans doute pas connus. Il s'est en outre couramment servi du Manuel de Camille Enlart, compilation pourtant bien vieillie et fourmillant d'erreurs par surcroît. Il y a néanmoins beaucoup de bon dans son texte, à commencer par les remarques et les explications que l'homme de métier est plus apte à concevoir que l'historien : ainsi sur la durée de construction des ouvrages en terre et en bois (p. 27-28), sur leur dégradation, leur difficulté d'entretien et leur déplacement (p. 30-31). Le colonel Rocolle s'est intelligemment efforcé d'expliquer l'évolution des forteresses médiévales en invoquant tour à tour la stratégie, la tactique, l'armement et les méthodes de combat, la technique des sièges, les institutions politiques et sociales, enfin les modes de financement. Il faut louer la largeur de ses vues, mais souligner en contrepartie la faiblesse et les lacunes de la mise en œuvre. Dans son compte rendu du « Bulletin monumental » (t. CXXXI, 1973, p. 187-188) M. Jacques Gardelles a formulé des reproches auxquels je m'associe et que je crois inutile de répéter.

La lecture des volumes est agaçante à cause d'un pourcentage beaucoup trop élevé d'erreurs sur l'âge des forteresses et sur l'orthographe des noms propres. Un exemple entre mille : le château de Framlingham en Suffolk est dénommé « château de Suffolk » sur le croquis 49. Les références bibliographiques pèchent aussi par négligence. Le médiéviste chevronné identifie assez facilement les livres et les articles dont le titre fut altéré ou le nom d'auteur estropié. Mais l'ouvrage est destiné à un large public d'amateurs, incapables en majorité de corriger les indications fautives.

Bien des assertions sont contestables, sinon erronées. En voici quelques spécimens. Laissons de côté les simples manoirs et maisons-fortes, quoiqu'ils fussent sans doute, dès avant 1200, beaucoup plus communs qu'on le croit d'habitude. Selon le colonel Rocolle, le château féodal fut conçu à partir du donjon qui, constituant encore l'élément principal au xne s., perdit sa prépondérance au xme et fut désormais souvent éliminé. Je pense que le château dérivait directement de l'enclos d'habitation carolingien dont le corps de logis, contracté, puis fortifié, fut de la sorte mué en donjon. Encore cette mutation se limitait-elle, semble-t-il, à la niasse des châteaux du nord et de l'ouest de la France capétienne. Dans le Midi le donjon était à l'ordinaire une tour purement défensive et non résidentielle. Quant aux palais princiers sis, à leur naissance du moins, à l'écart des villes emmuraillées, c'étaient des organismes complexes où le donjon n'était nullement obligatoire. Dans la seconde moitié du xne s., on commença de resserrer le périmètre de leur enceinte trop distendue et d'engager des tours volumineuses dans les courtines. Ainsi pourvus, les remparts acquirent bientôt une capacité de résistance telle que certains constructeurs jugèrent les donjons inutiles.

Les châteaux en terre et en bois ne naquirent point par génération spontanée. Ils se rattachaient au contraire à des traditions millénaires, aux résidences et aux forteresses de la préhistoire européenne. L'auteur n'a guère soufflé mot de ces archétypes malgré leur importance capitale. Il a seulement fait état des forteresses antiques et médiévales des pays méditerranéens dont l'influence, peut-être sensible d'abord sur les

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