COMPTES RENDUS ET NOTES BRÈVES 447

La publication par Pierre Chaunu de son livre sur La civilisation de classique marque une date dans l'historiographie française. Faut-il parler de la réhabilitation d'une époque maudite ? Ce serait céder au démon du sensationnel et oublier les robustes travaux déjà dressés sur le chantier par les aînés de l'auteur, à qui celui-ci rend un si juste hommage : ceux d'un V. L. Tapié, d'un Roland Mousnier. Pierre Chaunu est le premier à proclamer sa dette, notre dette envers eux, comme envers les historiens de sa génération qui œuvrent à ses côtés, tels Georges Livet, René Baehrel, Pierre Goubert surtout», avec qui de vastes pans de ce livre entretiennent un dialogue animé. Rien de la performance solitaire, donc,, et pourtant une œuvre intensément personnelle. Le mérite et le propre de Pierre Chaunu, au sein de cette pléiade de chercheurs, c'est de tenter, audacieuse et ample, la synthèse des temps classiques. C'est d'en substituer une compréhension nouvelle à la vision centenaire brossée par Michelet d'un âge tragique et sombre culminant avec le règne de Louis XIV : « il achève et finit beaucoup de choses, mais n'en commence aucune ». De ce procès instruit par une passion romantique qui reprend à son compte le désaveu révolutionnaire de l'Ancien Régime, l'appel ' interjeté à la fin du XIXe siècle par l'école positiviste et historisante ne suffit pas, ne suffit plus à infirmer le verdict. Les attendus d'un Taine, d'un Lavisse et de leurs sont trop étroitement politiques, leurs critères trop strictement . - pour ne pas dire nationalistes - pour emporter la conviction d'une génération d'historiens qui aspire à une histoire totale. Le moment était donc venu de mettre à profit les recherches récentes et de se risquer à un bilan neuf, qui les assimile, les ordonne et les dépasse. Une gageure.

Ce bilan n'a rien de celui du comptable. Il ne se soucie pas de pondérer, mais de jauger les grandes masses ; pas d'équilibrer les jugements, mais de prendre parti ; pas de nuancer, mais d'affirmer. Un acte de foi historique, d'une foi robuste qui s'appuie sur une connaissance étendue et profonde, d'une foi contagieuse, aussi, dans dynamisme de la réflexion historique., Il faut sans doute chercher dans son plan moins une logique dogmatique du réel que l'itinéraire d'une découverte. Partir des superstructures les mieux connues - État et États -, plonger dans le monde de mieux en mieux exploré des infrastructures ,- longue durée et civilisation matérielle -, situer enfin le lieu et le sens des grandes mutations de la conscience, , scientifiques, esthétiques, religieuses, c'est disposer fermement les degrés de