ANNALES DE DÉMOGRAPHIE HISTORIQUE 1998, 2, p. 269 à 287
La généalogie entre science et passion, textes réunis par Tiphaine BARTHÉLÉMY et Marie-Claude PINGAUD, Paris, Editions du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques, 1997, 422 p.
Suivant les usages du CTHS, ce volume reprend une partie des communications présentées dans le cadre de son congrès annuel, en l'occurrence le 120e, qui s'est tenu à Aix-en-Provence en octobre 1995. Cet ouvrage s'inscrit parfaitement dans l'évolution récente des travaux aussi bien universitaires que de vulgarisation consacrés à la généalogie. Du côté des universitaires, historiens, démographes mais aussi sociologues ou anthropo-biologistes ont redécouvert tout ce que la généalogie pouvait apporter par une prise en considération de la dimension familiale, pluri-séculaire, des événements, bénins en apparence lorsqu'il sont pris isolément, révélateurs de comportements sociaux et culturels lorsqu'ils sont analysés globalement. Rappelons que les Annales de Démographie Historique avaient consacré le volume 1984 aux approches généalogiques. Le terrain n'est donc plus uniquement dévolu aux amateurs dont l'engouement pour la généalogie, de la simple histoire familiale aux projets plus vastes (commune, patronyme) est soutenu par les très nombreux cercles généalogistes départementaux, régionaux ou d'entreprises.
Une gageure de cet ouvrage est de confronter les perceptions sociales et les expériences des uns et des autres, de renouer les fils d'un dialogue trop longtemps interrompu, de tirer un bilan des apports de la généalogie, « entre science et passion ». Dans le volume 1995 des Annales de Démographie Historique consacré aux réseaux de parenté, Rolande Bonnain avait souligné l'importance de « l'histoire familiale comme représentation ». À ce titre, les réflexions des éditeurs de cet ouvrage, sur le rôle de la généalogie dans le fonctionnement des sociétés contemporaines et les symbolismes qui s'y développent, donnent une dimension supplémentaire à ce recueil de textes.
Cependant, du fait de cette diversité des travaux et des perspectives dans lesquelles ils sont réalisés, le présent ouvrage est composite, extrêmement hétérogène, faisant voisiner l'anecdotique avec le scientifique, la spontanéité avec la formulation complexe. Le passage du particulier — l'histoire d'une famille — au général — l'histoire sociale — reste parfois comme en suspens. La lecture s'en trouve hachée, et elle sera différente suivant le public, avec la tentation pour l'un de sauter des textes plus légers, pour l'autre d'éviter des développements jugés arides ou hermétiques. En ce sens, le pari des organisateurs n'aboutit pas à une réussite parfaite, une synthèse qui semble encore utopique. L'introduction des éditeurs, constatant cette diversité pour ne pas dire ces divergences, et le plan peu apparent de l'ouvrage en témoignent.
Mais l'effort mérite d'être salué, soutenu, et l'ouvrage est intéressant à plus d'un titre. Les textes sont trop nombreux (31) et divers pour tous être cités ici. Quelques-uns retiendront plus particulièrement l'attention du démographe-historien soucieux des perspectives longitudinales et du temps long. Jacques Dupâquier, initiateur des rapprochements entre historiens-démographes et généalogistes, est bien entendu présent dans ce volume par une brève contribution rappelant les liens entre généalogie et histoire sociale (p. 201-205). Agnès Fine propose un résumé de son ouvrage récent sur « parrains et marraines » et développe le rôle des « lois du cœur » (p. 273-294). Olivier Zeller montre l'intérêt de
