A.M. CASSANDRE OU L'AUTOBIOTYPOGRAPHE

par Jérôme Peignot

Dans un article intitulé Publicité = poésie, Biaise Cendrars écrit en 1 928, alors qu'il vient de faire la connaissance de Cassandre : « La publicité est la fleur de la vie contemporaine, elle est une affir- « mation d'optimisme et de gaieté, elle distrait l'œil et l'esprit. C'est « la plus chaleureuse manifestation de la vitalité des hommes d'au- « jourd'hui... Oui, vraiment, la publicité est la plus belle expression « de notre époque, la plus grande nouveauté du jour, un art. Un « art qui fait appel à l'internationalisme, ou polyglottisme, à la psy- « chologie des foules et qui bouleverse toutes les techniques sta- « tiques ou dynamiques connues en faisant une utilisation intensive « sans cesse renouvelée et efficace.de matières nouvelles et de « procédés inédits. » Cassandre démontre le bien-fondé du postulat de Cendrars, non seulement avec ses affiches, mais aussi avec les lettres qu'il invente pour les écrire. En effet, il n'est guère d'affichiste qui ait fait preuve d'une aussi grande habileté dialectique. Pour lui, les lettres ne sont pas d'« encombrants partenaires », pour reprendre l'expression de Francis Ponge à propos des signes alphabétiques, mais les chevilles ouvrières d'un langage dont on finit par ne plus savoir s'il est de mots ou bien d'images. Parfois, l'imbrication a lieu tout naturellement, quand le mot imposé s'y prête. C'est le cas dans l'affiche Kina Nectar, où unejmême lettre N fait office... de bretelles pour tfrrdes/livreurs de Infirme "eyoquéer dansil'affûphe; pour" le Wôrdf Express? où les mots sontCieslbîeUeycfUîJangagë', et* dans l' Etoile du Nord, où les lettres sont les aiguillages du sens. Par-.