Couverture fascicule

De Georg Simmel à Siegfried Kracauer

[article]

Année 2000 70 pp. 45-52
Fait partie d'un numéro thématique : Seuils, passages
doc-ctrl/global/pdfdoc-ctrl/global/pdf
doc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/resetdoc-ctrl/global/reset
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
Page 45

Nicole Lapierre

En partant du pont : de Georg Simmel à Siegfried Kracauer

Pour Georg Simmel, il n'y a pas de détail trivial, pas de sujet anodin, la compréhension de la société s'articule au quotidien. Les arts de faire les plus courants, les plus ordinaires, révèlent nos façons de raisonner et nos manières d'arraisonner le monde. Ainsi, si l'homme, dans son environnement, fraie des voies et aménage des passages, c'est qu'il se voit en passant et qu'il pense en passeur. Tel est le thème central d'un texte court et dense, publié pour la première fois en 1909 sous le titre Pont et Porte1. Avec lui, nous partons de la morphologie des objets, de l'apparence du donné le plus concret et le plus familier, pour accéder aux strates profondes de la pensée et aux schemes d'intelligibilité de la société. Une démarche qui se poursuit avec Siegfried Kracauer, qui lui-même a appris de Simmel comment lire l'esprit d'une époque dans ses éclats de surface.

« C'est à l'homme seul qu'il est donné, face à la nature, de lier et de délier, selon ce mode spécial que l'un suppose toujours l'autre », note Simmel 2. L'animal peut certes parcourir de grandes distances, s'orienter, suivre des traces, mais « il n'opère pas le miracle du chemin3 », il ne relie pas le commencement et la fin du parcours. Le pont, plus encore que la route, matérialise la capacité humaine de concevoir à la fois l'écart et la jonction. En effet, pour nous, les rives ne sont pas seulement distantes et distinctes, nous les percevons comme séparées, ce qui implique déjà de les associer, et ce qui conduit à vouloir les rapprocher : « surmontant l'obstacle, le pont symbolise l'extension de notre sphère volitive dans l'espace4 ». Sa valeur excède sa signification pratique, elle est aussi esthétique : le pont ne permet pas seulement de traverser la rivière, il offre à l'œil une perception nouvelle du Heu dans lequel il s'inscrit et avec lequel il fait corps. Georg Simmel le compare à l'œuvre d'art, et particulièrement au portrait. Comme ce dernier, qui immobilise les traits tout en restituant

45

doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw