Les loess de Goderville (Seine-Maritime) : stratigraphie et industries préhistoriques
par J.P. LAUTRIDOU*, G. VERRON**, et G. FOSSE
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RESUME
ABSTRACT
L'ancienne carrière de Goderville est située, à 125 mètres d'altitude, dans la partie ouest du Pays de Caux, à 20 kilomètres au nord du pont de Tancarville.
La notoriété du gisement tient aux recherches de F. Bordes (1954) et à leur double conclusion : d'une part, l'existence d'une industrie préhistorique de transition entre le Moustérien et le Périgordien, c'est-à- dire correspondant au passage du Paléolithique moyen au Paléolithique supérieur, d'autre part, la position stratigraphique des silex taillés, à la charnière entre le Wurm II et le Wurm III.
L'étude de la carrière a été reprise par J. de Heinzelin (1961) avant la fermeture de la carrière, puis par J.P. Lautridou (1965, 1968). L'âge attribué par F. Bordes aux loess de Goderville a été discuté par ces deux derniers auteurs.
Des menaces planant sur la sauvegarde du site, nous avons entrepris de nouvelles recherches et retrouvé en place des silex taillés à partir de 1972 (Verron, 1973, pp. 390-392).
I. - Etude stratigraphique
La briqueterie est placée sur un interfluve entre de
* Centre de Géomorphologie du C.N.R.S. ** Direction des Antiquités Préhistoriques de Haute et Basse Normandie.
petits vallons érodant les limons éoliens et les formations tertiaires (fig. 1 A). La puissance des couches loessiques varie de 3 à 9 mètres en fonction de la topographie irrégulière du substrat : peu épais sur les petites buttes d'argile et de sables tertiaires ("sable de Lozère" fini-tertiaires) les limons prennent de l'importance dans les creux (7 à 9 mètres d'épaisseur) (fig. I B).
Les zones examinées par Bordes, Heinzelin et Lautridou sont différentes (fig. 1 A), cependant les corrélations entre les coupes se font aisément. La paroi H, levée par Heinzelin, est identique aux coupes L (Lautridou, 1965) et AB, que nous avons étudiées, excepté en un point (absence de notre limon 4-5, fig. 1 B, coupe 2). Les sections AB, H, L (fig. 1 A) sont en effet caractéristiques de la séquence wurmienne normande (Lautridou, 1972) commençant, au-dessus du sol brun lessivé Riss-Wurm, par un limon argileux soli- flué ou ruisselé (Wurm ancien — Wiirm I) et se poursuivant par deux loess non calcaires lités ("limons à doublets") du Pléniglaciaire inférieur (Wurm 2) et supérieur (Wûrm 3) ; le sol brun lessivé holocène couronne ce cycle. La coupure entre les deux loess 2 et 3 se définit par un niveau d'érosion très marqué (niveau de Kesselt) jalonné par des cryoturbations et par des langues de gélifluxion déformant de petites fentes. Cette stratigraphie, établie à Saint-Romain (12 km au Sud de Goderville), se retrouve à Goderville (fîg. 1 B) : sol Riss-Wùrm (couche 7), Wurm ancien - Wûrm 1 (couche 6), Pléniglaciaire inférieur — Wiirm 2 (couches 4-5), Pléniglaciaire supérieur — Wurm 3 (couches 2-3).
