Économie et société en Italie du Nord d'après un ouvrage récent*

L'Institut d'histoire médiévale de l'Université catholique de Milan inaugure avec ce volume une nouvelle série de « contributi » destinée à accueillir, sans une périodicité trop rigoureuse, des travaux et mémoires originaux élaborés par les maîtres et les meilleurs élèves de ce centre de recherches1. Ces premiers « mélanges », dédiés à la mémoire de Giovanni Soranzo, rappellent opportunément le rôle sans doute discret mais nullement négligeable qu'y a joué pendant plus de trente ans ce savant réservé et laborieux*. Classés selon l'ordre alphabétique des noms d'auteurs, les travaux publiés concernent pour une bonne part les xe-xne s. et méritent à ce titre un signalement particulier dans cette revue.

Voici tout d'abord un bref article d'Arly H. Allen sur la famille de l'archevêque de Milan Guido da Velate (1045-1071) qui a joué un rôle déterminant dans la Pataria8. En établissant un rapport de parenté très étroit entre l'archevêque Guido et Arnulf [I], prévôt de l'importante collégiale de S. Maria de Monte Velate, l'auteur réussit du même coup à relier Guido lui-même, grâce à son neveu Arnulf, à un lignage aristocratique local dont on peut suivre assez bien les destinées tout au long des xi-xne s. à travers le chartrier de S. Maria. Il est clair que la reconstruction généalogique d'Arly Allen repose tout entière sur le lien familial supposé entre l'archevêque Guido et Arnulf [I]. Quoique nous ne disposions à cet égard d'aucune preuve textuelle formelle, le faisceau de présomptions rassemblé par l'auteur permet d'accepter cette hypothèse suggestive.

Dans la même direction, le volume offre ensuite une étude minutieuse et approfondie consacrée par Mlle Maria Luisa Corsi à la famille des « da Baggio »4. Cette recherche prend un relief particulier si l'on se rappelle que le lignage des seigneurs de Baggio, élément typique de la couche supérieure de l'aristocratie chevaleresque du contado milanais (les « da Baggio » sont capitanei de plèbe de la « pieve » de Cesano Boscone, quelques kilomètres à peine à l'ouest du Milan médiéval), a donné à la Chrétienté le pape Alexandre II (f 1073) et saint Anselme de Lucques (f 1086). L'appartenance d'Alexandre II à la famille « capitaneale » de Baggio avait déjà été pressentie avec pénétration par Cinzio Violante dans une longue note critique de sa Pataria?, où s'articulait très solidement la démonstration reprise par Mlle Corsi. Le mérite n'est cependant pas moins grand, pour cette dernière, d'avoir débrouillé avec beaucoup de sûreté l'écheveau compliqué de cette dynastie dont les plus anciens représentants sont attestés dès la fin du rxe s. et d'avoir reconstitué la sphère concrète à l'intérieur de laquelle s'est exercée leur puissance. Dans cette étude, première partie d'un travail plus ample, l'auteur s'est surtout penchée sur les problèmes proprement généalogiques que pose l'histoire des seigneurs de Baggio. De nombreuses questions n'ont été qu'effleurées. Les vicissitudes du patrimoine foncier, l'exercice des juridictions seigneuriales, les liens des « da Baggio » avec Saint-Ambroise et avec la société milanaise en général exigeraient des développements particuliers, ainsi que Mlle Corsi le reconnaît elle-même de bonne grâce (p. 203). Mais la présente étude, si précise et prometteuse, ne fait pas douter que ces derniers aspects seront ultérieurement abordés par elle avec un égal bonheur.

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