NOTES SUR LA CIVILISATION GUARANIE

Par Annie BOULE Membre libre de la Section Scientifique

L'expression de «civilisations précolombiennes» évoque, pour la plupart des européens, les aztèques que trouva Cortez au Mexique, les incas que trouva Pizarro au Pérou, parfois aussi les mayas et quichuas, mais généralement peu d'autres peuples. Il y eut cependant une multitude de races d'«indiens» qui sont loin de se limiter, en Amérique du Sud, à l'Empire du Soleil. Parmi tous ces peuples autochtones, les guaranis occupaient une place importante et nous allons évoquer quelques aspects de leur rôle passé et présent.

Les origines de ce peuple, qui n'ont pu être scientifiquement déterminées, ne sont expliquées que par des hypothèses. Rubio-Fuentes croit que les tupi-guaranis ont existé en Amérique avant l'ère chrétienne, mais qu'il est très peu probable qu'ils aient construit des villes à l'époque précolombienne, comme tenta de le démontrer M. S. Bertoni en 1913 *. En effet, l'une des grandes difficultés que présente l'étude de ce peuple est qu'elle ne peut s'appuyer sur l'archéologie, et elle n'a pas non plus, par conséquent, le prestige des civilisations lointaines et mystérieuses ayant laissé d'imposants vestiges. Certains vieillards du Guaira ont bien prétendu qu'il y avait des ruines indiennes au fond du lac Ypacarai (près d'Asunciôn), mais nul n'a pu prouver qu'il ne s'agissait pas d'une simple légende *. Le Dr. A. Duarte nie l'existence d'architecture préhispanique au Paraguay, et Wanda Hanke, qui vécut dix ans parmi les tribus de l'Amazone et passa par Madrid en 1955, ne mentionna aucune ville guaranie précolombienne 1.

Il est vrai qu'on trouva dans l'île Marajo, à l'embouchure de l'Amazone, des ornements, vases, urnes et céramiques de caractère étrusque attribués à des groupes guaranis 1, mais il est plus probable que ces objets proviennent d'autres tribus, réduites à l'esclavage par les guaranis. Il ne reste à signaler comme vraisemblablement guaranies que quelques inscriptions sur pierre trouvées dans la grotte Santo Tome à 50 km. d'Asunciôn, et à San Ignacio Mini * (dont nous reparlerons, dans les Mis-