L'énonciation

éditoriale

dans les écrits d'écran

MÉTHODOLOGIE

On dit beaucoup aujourd'hui que le monde de l'édition des textes est bouleversé par l'arrivée du « numérique ». De fait, on y porte maint projet, on y fait nombre de prophéties et on s'y invective ferme. Derrière ces mouvements et ces humeurs, s'impose insensiblement un style de discours, qui nous habitue à ce qu'on nomme « (auto) publication numérique ». Les transformations y sont décrites comme urgentes, radicales, requérant avec insistance que tous les acteurs se mobilisent et que la recherche se fasse action 2.

À tout cela, nous sommes habitués. On remarque moins que ces discours radicaux, qui évoquent en permanence l'image de la table rase, reposent profondément sur un ensemble de catégories chargées d'une lourde histoire intellectuelle, comme l'« éditeur », le « format », l'« archive », l'« autorité », etc. Catégories qui sont invoquées comme allant de soi, si bien qu'il est fort difficile de suggérer une pause, un temps de réflexion critique, sur ce que signifie réellement cet usage - de remarquer, par exemple, qu'archiver, éditer, publier, diffuser n'est pas la même chose - sans faire l'objet d'une agression immédiate. La référence au geste editorial est indispensable à la valorisation des projets mais l'interrogation critique sur sa nature est vécue comme une

YVESJEANIMERET EMMANUEL SOUCHIER

communication & langages - n° 145 - Septembre 2005