, 568 pp. («Subsi- dia» au «Corpus des troubadours», 12).
Voué jusqu'à présent à jouer tout au plus les seconds rôles dans le gran teatro du monde des troubadours — et peut-être plus connu pour l'ancienne biographie — qui en fait le héros d'une aventure mélodramatique d'amour et de mort destinée à charmer le public assez naïf des vidas et des razos — , Raimon Jordan, vicomte de Saint-Anto- nin, est maintenant l'objet d'une remarquable étude philologique et critique par Stefano Asperti.
Poète exclusivement d'amour — à cette inspiration unique on peut ramener, en effet, tout son can- zoniere, pourtant non négligeable (douze textes d'attribution certaine, selon son éditeur, ce qui implique l'exclusion définitive du sirventès à voix féminine No.m pose mudar no diga mon vejaire) — , Raimon n'est un créateur original ni de formes ni de contenus. C'est plutôt un remanieur diligent, sans être servile, des thèmes et situations-types qui, après Bernait de Ventadorn et Arnaut de Maruelh ainsi que les premiers essais de Peirol, représentaient désormais la base essentielle de la communis poetria des troubadours à la fin du xne s. C'est dans cette perspective que St. Asperti consacre une bonne partie de son introduction et de son riche et rigoureux commentaire de chaque texte, à reconstruire le réseau serré de rappels, échos et reflets reliant la poétique de Raimon à ses prédécesseurs désormais consacrés — tout d'abord, Peirol, dont Raimon s'inspire pour sa tenson fictive avec Amour — ainsi que, et peut-être surtout, à des contemporains comme Gaucelm Faidit et Arnaut Daniel qui, marchant eux aussi dans le sillage de la génération de 1170, avaient atteint des résultats