NOTES BIBLIOGRAPHIQUES GROSSER Alfred Le crime et la mémoire Paris Flammarion 1989 23 cm 268 De tous les livres Alfred Grosser celui-ci est peut-être le plus personnel Pas seulement parce que dans avant-propos pour répondre la question qui parle il évoque avec pudeur et dignité les circonstances de enfance et de adolescence qui auraient pu en faire douter autres de humanité et où sa générosité puisé des motifs de confiance pour ses semblables ni non plus pour les réflexions conclusives qui situent son action et réfèrent sa pensée par rapport la mort Mais surtout parce que ce livre dans le choix du sujet dans sa conception comme dans sa facture porte au plus haut point la marque de sa personnalité intellectuelle et morale Il inscrit dans la continuité de toute son uvre et se situe au point où entrecroisent exactement les deux traits qui caractérisent le plus fermement sa démarche de savant et son comportement de citoyen la pratique de la comparaison et la préoccupation du moraliste La comparaison il en fait la théorie et en défini les règles dans explication politique livre paru en 1972 et republié en 1985 que je tiens pour un livre essentiel qui est un Discours de la méthode des sciences sociales et dont on souhaiterait il soit lu par quiconque entreprend des études dans ces disciplines Il constamment pratiquée dans son action comme dans ses écrits comparaison dans espace en particulier entre la France et Allemagne compa raison dans le temps entre les périodes comparaison entre les régimes et les sociétés Il pas explication complète et moins encore appréciation équitable sans comparaison qui mette en perspective et situe par rapport des phénomènes qui soient précisément comparables Que la comparaison pour être nécessaire ne soit pas simple et elle exige prudence et discernement Alfred Grosser le sait comme personne Et il en fait une éblouissante démonstration dans Le crime et la mémoire En appliquant une démarche comparative au sujet qui prêtait peut-être le moins il devait triompher de trois objections qui récusaient dans son principe même le projet de ce livre La première était pas la plus dirimante est celle que rencontre tout essai de comparaison au nom de la singularité irréductible de tout fait social Il pas deux événements semblables moins encore identiques En conséquence tout rapprochement serait artificiel et tout parallèle arbitraire puisque méconnaissant cette singularité En se fondant sur de nombreuses réussites comme sur une réflexion au fond il est hui possible de démontrer que non seulement la comparaison peut tenir compte des particularités mais elle est la voie royale pour mettre en évidence originalité une fois la part faite des analogies La deuxième objection était un autre ordre plus moral intellectuel Sur pareil sujet qui blesse la sensibilité et intéresse la conscience morale toute comparaison ne serait pas seulement fallacieuse mais sacrilège elle mettrait sur le même plan des souffrances incommensurables et traiterait équivalemment des culpabilités qui ne relèvent pas de la même échelle appréciation Le seul fait inscrire le génocide dont les Juifs ont été objet de la part du II Reich dans une série est-ce pas le banaliser effacer son caractère exceptionnel nier son irréductible singularité est le point de vue Elie Wiesel autres admettent pas le rapprochement entre les crimes de Staline et ceux Hitler entre le goulag et les camps nazis au motif que le communisme serait une idéologie plus généreuse que le national socialisme ou que ses monstruosités en seraient que 918