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« La solution, voilà le problème »

[article]

Année 1998 118 pp. 113-115
Fait partie d'un numéro thématique : Dossier : La mondialisation en marche
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« LA SOLUTION, VOILÀ LE PROBLÈME » :

L'affaire Sokal ou la querelle des impostures*, ouvrage de Yves Jeanneret

Note liminaire : Pour une meilleure compréhension de « l'affaire Sokal », se reporter à l'article publié dans le présent numéro, où Yves Jeanneret retrace les éléments essentiels de cette « affaire ».

Certains commentateurs prétendent qu'on ne pourra bientôt plus traverser l'histoire des sciences de notre siècle finissant sans se prendre les pieds dans ce qu'il est désormais convenu d'appeler « l'affaire Sokal ». L'histoire des sciences... est-ce vraiment si sûr? Ne s'agit-il pas plutôt de l'histoire des médias ou de cette branche particulière de l'histoire intellectuelle qui s'intéresse à la circulation des savoirs et à ce que Yves Jeanneret a fort justement appelé « la culture triviale »2 ? Par quel subterfuge l'histoire des sciences - telle que nous la considérons encore de nos jours - devrait-elle retenir le nom d'un individu qui accéda à la reconnaissance de ses pairs non par la légitimité de ses travaux de physicien, mais sous couvert d'un talentueux canular de potache rapidement doublé d'un « commentaire-manifeste »? C'est en effet à partir de ce dispositif textuel, qui plonge allègrement dans le mélange des genres littéraires,

1 . Coll. « Science, histoire et société » dirigée par Dominique Lecourt, PUF, 1998, 274 p., 148 FF.

2. Voir Yves Jeanneret, Ecrire la science. Formes et enjeux de la vulgarisation, coll. « Science, histoire et société » dirigée par Dominique Lecourt, PUF, 1994, 398 p.

que Sokal a forgé son image médiatique. La petite histoire retiendra sans doute la transformation professionnelle de Sokal, ce physicien qui devint un jour « pisse copie », selon l'heureuse expression de Boris Vian, mais pourquoi diable l'histoire des sciences devrait-elle s'arrêter sur les frasques d'un énurésique scribal ? À n'en pas douter, ça n'est pas du côté de la science mais bien de celui de l'écriture et des médias qu'il convient d'afficher le nom de l'imposteur. La « déconstruction » méthodique de « la querelle », que nous propose Yves Jeanneret, ne laisse planer aucun doute a ce sujet, bien qu'il le fasse de façon moins polémique que mes propos tendraient à le faire croire. Ne reste plus qu'à s'affranchir du caractère « psychologique » de la démarche, même si on peut légitimement s'interroger sur l'acte qui consiste à jeter l'opprobre sur des intellectuels célèbres afin de profiter de leur renommée. Le talent de Sokal ? Avoir su jouer des différentes postures d'écriture, d'édition et d'énonciation sans jamais dénoter clairement cette activité de transformation textuelle qui fait qu'il y a échange d'idées, circulation de savoirs. Ce faisant, Sokal restait dans la pseudo- naturalité de l'acte d'écriture, espace mythique de l'innocence qui est le creuset de ce que Barthes a appelé, il y a plus de trente ans déjà, « l'idéologie bourgeoise ». Cette « naturalité » des actes d'écriture et d'édition, sur lesquels

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