Couverture fascicule

Reto R. Bezzola. — Les origines et la formation de la littérature courtoise en Occident (500-1200) ; 2e partie, La société féodale et la transformation de la littérature de cour.

[compte-rendu]

Année 1962 5-18 pp. 205-207
doc-ctrl/global/pdfdoc-ctrl/global/pdf
doc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/resetdoc-ctrl/global/reset
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
Page 205

COMPTES RENDUS

Reto R. BEzzoïvA. — Les origines et la formation de la littérature courtoise en Occident (joo-1200) ; 2e partie, La société féodale et la transformation de la littérature de cour. Paris, Champion, i960, 2 vol. in-8°, 664 pp. (« Bibliothèque de l'École des Hautes Études », 313).

La première partie de ce monumental ouvrage remonte à 1944. M. Bezzola y étudiait l'influence des milieux cultivés du moyen âge sur le développement de la littérature courtoise européenne, et il s'attachait spécialement à l'époque carolingienne. Reprenant sa marche, il nous conduit maintenant de la fin du ixe siècle au milieu du XIIe, très exactement jusqu'à YHistoria regum Britanniae de Geoffroy de Monmouth.

Nous assistons à l'essor des lettres dans la société féodale. Jusque vers l'an 1000, la culture des grands seigneurs féodaux ne fait guère de progrès, le seigneur se contentant de protéger les abbayes et les évêchés qui constituent des centres littéraires (à l'exception du Sud de l'Italie où la cour royale ou impériale n'absorbe pas les clercs formés dans les couvents : rôle d'Éric de Frioul, d'Evrard). La disparition des dynasties carolingiennes de France et d'Allemagne marque la fin de ces rares mécénats littéraires parmi les grands seigneurs ; la culture profane trouve maintenant un terrain propice dans les abbayes et les cours épiscopales. En Espagne, en Angleterre, mais surtout en France et en Belgique les bibliothèques des cathédrales et des monastères possèdent non seulement des œuvres théologiques, mais bien des poètes chrétiens et païens, Horace, Virgile, Juvénal, Boèce, des traductions latines de Platon, d'Aristote, etc. Dans un long chapitre M. Bezzola passe en revue ces écoles épiscopales : Reims, Chartres, Orléans, Toul, etc., Liège surtout dont la renommée s'affirme au xe siècle avec Notker ; dans l'Ouest, c'est Poitiers, Limoges, Angers, Tours, etc. Ce sont les abbayes de Saint-Martin de Tours, de Saint-Benoît-sur-Loire, Ferrières, Stavelot, Saint-Germain-des-Prés, et les abbayes normandes du Bec, de Jumièges, de Saint-Étienne de Caen qui prendront bientôt un grand essor. Pour les pays de langue germanique la liste est longue avec, entre autres, les cours épiscopales de Mayence, de Spire, de Cologne, de Trêves, d'Osnabruck (où l'on enseigne le grec, à noter) ; ici les abbayes ont joué un rôle prépondérant : Reichenau, Saint-Gall, Tegernsee, c'est dans ces régions que naissent des œuvres de caractère profane, comme le Waltharius ou le Ruodlied (copié, et peut-être écrit à Tegernsee). Le cas de l'Italie est un peu différent : il y a continuité de l'enseignement depuis les écoles de l'antiquité, et cependant la littérature profane est presque absente en Italie, les classes régnantes marquant peu d'intérêt pour les choses de l'esprit. Rome n'a qu'une importance de second plan, Milan est plus acquis à l'humanisme, Vérone nous offre l'évêque Rathier, une des grandes figures littéraires du xe siècle, saint Pierre Damien illustre Parme, Naples garde la tradition antique renouvelée par les apports de l'Orient. Au Mont-Cassin les classiques sont à l'honneur, surtout dans la deuxième moitié du XIe siècle. C'est finalement sur la Loire que l'étude et l'imitation des auteurs de l'antiquité préparent la renaissance du xne siècle. Tours, Angers, Orléans, Chartres donnent une impulsion déterminante.

Et l'Europe musulmane ? La poésie d'amour y paraît très tôt, dès le ixe siècle avec les vers de l'émir Abd1 Allah. Le Collier de la Colombe d'Ibn Hazm (vers 1020) nous ramène au problème de l'origine de l'amour courtois ; cette poésie, qui atteint son point culminant au xie siècle, use de la forme strophique à refrain (le « zejel ») dont le succès fut grand non seulement en arabe, mais en espagnol. Or, au moment où les États chrétiens reprennent l'offensive avec succès contre le monde arabe affaibli et pénètrent jusqu'en Andalousie, toute une littérature courtoise se manifeste en France. A ce problème toujours débattu de l'origine arabe, après avoir exposé les thèses en présence, M. Bezzola se garde d'apporter une réponse définitive. Remarquant que chez les Arabes l'amour va à une femme individuelle, que la femme n'est pas l'incarnation d'un idéal de beauté, que bien des motifs appartiennent à la fois à la poésie arabe et à d'autres poésies erotiques, que les formes métriques du « muwashah » et du « zadjal » ne sont pas sans analogie avec

205

doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw