, 40, 310 pp., 48 fig., 92 ill. en 71 h. t. dont 47 coul.
I^a bibliographie française sur l'art germanique du haut moyen âge est très pauvre. En France, l'œuvre artistique médiévale a été longtemps identifiée avec les monuments romans et gothiques et étudiée dans les créations françaises de ces époques plus avancées. C'est ce qui explique le jugement qu'Emile Mâle a pu porter sur l'art germanique médiéval, dans un petit livre malheureux publié à la fin de la première guerre mondiale (1917) : L'art allemand et l'art français du moyen âge. Son attitude méprisante a bien pour origine — en grande partie — le peu de connaissance de l'art germanique qu'il avait. Mais il est juste de rappeler aussi que bien des historiens allemands de l'art médiéval confondaient l'art du moyen âge avec l'œuvre germanique, et décourageaient le lecteur étranger par leur nationalisme.
Fort heureusement on n'en est plus là, et le présent ouvrage contribuera, je l'espère, à faire mieux connaître en France un chapitre de l'histoire de l'art médiéval qui concerne de très belles créations des architectes et artistes allemands, et à constater que les critiques d'art allemands, de nos jours, ont su adapter leurs vues à l'esprit européen de notre temps.
Ce n'est certes pas le premier livre en langue française qui traite de l'art carolingien et ottonien. Après la monographie de I,. Grodecki, L' architecture ottonienne. Au seuil de l'art roman, en 1958, la collection « I/Univers des formes », chez Gallimard, a fait paraître trois volumes richement illustrés qui, entièrement ou en partie, traitent de l'art germanique du haut moyen âge : L'Europe des invasions, l'Empire carolingien. Le siècle de l'an mil (1967, 1968, 1973). V architecture y est présentée par J. Hubert et L,. Grodecki.
Mais le livre que nous recensons ne fait double emploi avec aucun de ces ouvrages. Car si, comme les livres publiés par Gallimard, il propose une synthèse, cette présentation de l'art germanique du haut moyen âge, bien plus concise, se prête mieux à faire ressortir les faits essentiels, que ce soient les principaux monuments ou les grandes étapes d'une évolution.
I^es deux auteurs de ce livre sont des critiques d'art chevronnés, spécialisés dans l'étude de l'art du moyen âge, et leurs textes en portent témoignage : ils connaissent aussi bien les œuvres dont ils parlent que les problèmes qu'ils posent aux historiens allemands et qui concernent tout aussi bien la chronologie des œuvres d'art que les formes, l'esthétique et les techniques. Accompagné de très bonnes illustrations, de dessins d'architecture et de photographies en couleur et en noir sur blanc, ce livre informe avec compétence sur un grand art et l'un des plus attrayants créés au moyen âge. Ce qui n'exclut pas, mais appelle, au contraire, plusieurs remarques, dont voici l'essentiel, selon moi. Ces remarques seront exposées séparément, pour la partie réservée à l'architecture et signée par E. Kubach, et pour la partie que V. Elbern consacre aux arts figuratifs et plastiques.
1. « Architecture », par Kubach. Sur les cent pages de ce texte, quarante-sept c'est-à-dire presque la moitié ont pour objet des monuments qui n'auraient pas dû être étudiés dans ce volume, parce qu'ils ne relèvent pas de l'Empire, et ne sont ni carolingiens ni ottoniens. Kubach s'écarte ainsi du programme défini par le titre du livre, et ses aperçus trop rapides des édifices des Asturies, de la Catalogne, de l'Angleterre et de l'Irlande, des I/Ombards, ne me paraissent pas utiles à l'étude des œuvres carolingiennes et ottoniennes qui suit.
L/auteur les décrit une à une, en choisissant judicieusement ses exemples, et en relevant les traits typiques de chacun des édifices évoqués. Mais pour deux raisons, la lecture de ces descriptions n'est pas toujours aussi instructive qu'on le souhaiterait. D'une part, dans bien des cas, la description proprement dite y
